samedi 4 mars 2017

Les Mots à la dérive #9 : Fascisme et complotisme

Les Mots à la dérive #9 : Fascisme et complotisme


Fascisme: « 1. Régime établi en Italie de 1922 à 1945, instauré par Mussolini et fondé sur la dictature d’un parti unique, l’exaltation nationaliste et le corporatisme. 2. Doctrine et pratique visant à établir un régime comparable, à des degrés divers au fascisme italien: ce régime ». 
Facho (fasciste) : « Qui manifeste une autorité arbitraire, dictatoriale ou violente ». (Le petit Larousse illustre 2016)

Complotisme : (Inconnu par le Larousse en 2016): Système explicatif du monde qui postule l’existence d’un complot, à l’échelle supranationale ou mondiale, destiné à manipuler les populations, au profit d’une oligarchie occulte.
Notons directement que le « complotiste », contrairement à ce que son nom pourrait faire croire, n’est pas un défenseur du complot mais bien son pourfendeur.

Ces deux termes désignent des visions du monde qu’il ne s’agit pas ici d’étudier. Par contre nous aimerions discuter de leur usage, et plus spécialement de leur dérive sémantique.

A l’heure actuelle, les termes « facho » et « complotiste » sont surtout utilisés pour discréditer la position d’un débatteur. Traiter un interlocuteur de « facho » revient à diaboliser ses propos politiques ou moraux. Le traiter de « complotiste » qualifie ipso facto son raisonnement d’irrationnel ou de stupide.

Cette pratique relève d’une inquiétante dérive des mots. Par exemple, un homme politique qui souhaite protéger économiquement son pays risque d’être rapidement qualifié de facho. Comme s’il existait un lien évident entre le soutien à ses artisans ou à ses producteurs et le corporatisme puis l’exaltation du nationalisme et donc, finalement, le fascisme! Ces explications par analogies ne relèvent pas de la pensée rationnelle moderne. Si certains d’entre vous soutiennent tout de même que vouloir encourager la consommation nationale est du fascisme, qu’ils s’intéressent à la déclaration du gouvernement wallon du 24 novembre 2016

 
Il n’est pas plus correct de traiter de complotiste tout qui remet en cause les déclarations des grands Etats. Bob Woodward était-il un complotiste lorsqu’il a dévoilé le Watergate ? Existe-t-il encore un doute sur l’existence d’armes de destruction massive présentées solennellement à l’ONU par les USA?
La remise en cause de la parole officielle est une nécessité cruciale pour la vie en commun. L’histoire est truffée de mensonges assainis comme des vérités évidentes.

La dérive de ces mots continue car pour se prémunir de l’émergence du fascisme et du complotisme, certaines personnes de très bonne foi les lancent comme des anathèmes à quiconque ose exprimer une idée qui remet en cause leur propre système supposé le meilleur. Ainsi, paradoxalement, c’est au nom de la morale et de la science que les mots « fascisme » et « complotisme » risquent de transformer ceux qui les prononcent sans discernement en des fossoyeurs de la pensée. Car s’il existe réellement des fachos et des complotistes, il existe aussi une saine remise en cause et des critiques valides de notre société. Méfions-nous:  faut-il jeter le bébé avec l’eau du bain ?

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